Prêt à taux zéro : inquiétudes autour de cet outil de l'inclusion sociale
Face à l'attente grandissante pour l'obtention d'un logement social - 2,42 millions de familles en attente fin 2022 - le gouvernement a annoncé un pacte de confiance avec les bailleurs sociaux. Pourtant, cette volonté de renforcer la production de logements sociaux et le soutien aux organismes n'a pas fait l'unanimité. Le président de la Fédération française du bâtiment (FFB), Olivier Salleron, parle même de "déception".
Le rôle crucial du PTZ mis en lumière
L'un des griefs majeurs concerne le recentrage du prêt à taux zéro (PTZ). Damien Hereng, président de la Fédération Française des Constructeurs de maisons individuelles (FFC), critique fortement la suppression du PTZ pour la maison individuelle, y voyant un frein à l'accession à la propriété pour les catégories populaires et modestes. Marie-Noëlle Lienemann, présidente de la Fédération nationale des sociétés coopératives d’HLM, corrobore ce constat, affirmant que cette situation risque d'accroître la demande déjà forte de logements sociaux.
Un contexte préoccupant pour le logement social
Cette réalité s'ajoute à la situation tendue du logement social, principalement caractérisée par l'indexation des remboursements sur le taux du livret A, la rareté et le coût du foncier. Marie-Noëlle Lienemann alerte sur un "goulet d'étranglement" et appelle à une politique de régulation des prix du foncier et des loyers.
Des propositions non retenues
Malgré une série de propositions faites par les acteurs du secteur, notamment la création d’un statut fiscal spécifique pour les bailleurs privés et le plafonnement des prix de vente du foncier, peu ont été retenues par le gouvernement. Cela a provoqué des réactions de déception et de colère parmi les professionnels du secteur.
Un avenir incertain
Pour répondre au tableau pessimiste dressé par les acteurs du logement et du bâtiment, le gouvernement assure que les mesures annoncées ne sont pas définitives. Les prochains mois permettront sans doute d'affiner les impacts potentiels de ce type de réforme. Mais pour l'instant, l'ombre du doute plane sur le secteur du logement social et l'accession à la propriété.
Comprendre le Prêt à Taux Zéro (PTZ)
Le Prêt à Taux Zéro (PTZ) est un dispositif d’aide financière destiné aux personnes qui souhaitent acquérir leur premier bien immobilier, aussi appelées "primo-accédants". Il s'agit d'un prêt complémentaire qui s'ajoute généralement à un prêt immobilier principal.
- Qui peut en bénéficier ?
Pour être éligible au PTZ, il faut respecter certaines conditions. Il faut être primo-accédant, c'est-à-dire acheter sa première résidence principale, ou ne pas avoir été propriétaire de sa résidence principale durant les deux dernières années précédant l'offre de prêt. De plus, les ressources de l'emprunteur ne doivent pas dépasser un certain plafond, qui varie en fonction de la composition du ménage et de la zone géographique du logement.
- Quel est son montant ?
Le montant du PTZ dépend de plusieurs critères, comme la zone géographique du bien immobilier, le nombre de personnes destinées à habiter le logement, et si le logement est neuf ou ancien. Il est calculé sur la base du coût de l'opération, sans pouvoir excéder un certain plafond. Le PTZ ne peut pas financer l'intégralité de l'achat, il doit être complété par un ou plusieurs autres prêts.
- Comment est-il remboursé ?
Le PTZ bénéficie d'une période de différé de remboursement, c'est-à-dire une période pendant laquelle l'emprunteur ne rembourse pas le prêt. Cette période peut durer entre 5 et 15 ans, en fonction des revenus de l'emprunteur. Après cette période, l'emprunteur commence à rembourser le prêt, sur une période qui peut aller jusqu'à 25 ans.
- Pour quel type de logement ?
Le PTZ est destiné à financer l'achat d'un logement neuf ou ancien, à condition qu'il devienne la résidence principale de l'emprunteur. Dans le cas d'un logement ancien, des travaux d'amélioration d'un certain montant ou des travaux rendant le logement "neuf" peuvent être requis pour être éligible au PTZ.
Le PTZ est un outil essentiel pour favoriser l'accession à la propriété pour les ménages aux revenus modestes. Cependant, il est actuellement menacé, ce qui suscite de nombreuses inquiétudes parmi les acteurs du secteur du logement social et de la construction.
Un exemple concret
Jean et Marie vivent dans une zone rurale (zone C) et prévoyaient de construire leur propre maison, une maison individuelle, ce qui est courant dans leur région. Cependant, avec la réforme du PTZ, les zones rurales comme la leur et les maisons individuelles ne sont plus éligibles à ce type de soutien financier.
Jean et Marie font partie des jeunes ménages (26-35 ans) qui sont les plus touchés par ces changements. Ils sont modestes, ce qui signifie qu'ils bénéficieraient grandement du soutien financier que le PTZ pourrait leur apporter. En 2022, 48% des PTZ ont été attribués à des ménages de leur tranche d'âge.
De plus, les taux d'intérêt des prêts immobiliers augmentent, ce qui rend le coût de leur prêt potentiel plus élevé qu'ils ne l'avaient initialement prévu. Ajoutons à cela, l'augmentation des coûts de construction, notamment en raison de la hausse des prix des matériaux, leur budget pour construire leur maison individuelle est mis à rude épreuve.
La réforme du PTZ ne vise pas uniquement à réduire le coût du soutien financier pour l'État, mais aussi à favoriser les logements collectifs dans des zones tendues et à limiter l'artificialisation des sols et l'augmentation des émissions de CO2 liées aux déplacements en voiture. Malheureusement, cela ne prend pas en compte la réalité des ménages comme Jean et Marie qui vivent dans des zones rurales et qui souhaitent construire leur propre maison.
C'est ainsi que le rétrécissement du PTZ pourrait effectivement bloquer ou retarder l'achat d'une maison pour des ménages comme Jean et Marie, en particulier dans des zones rurales ou faiblement tendues.